Les différentes stratégies du nucléaire en Europe : l’actualité en France et en Allemagne
Alors que le 26 avril à Paris, les conclusions du débat public consacré à la construction de six nouveaux réacteurs EPR de deuxième génération ont été rendues publiques ; en Allemagne, la fermeture des trois dernières centrales nucléaires le 15 avril a définitivement mis fin à l’atome dans le pays.
En France, lors des rencontres organisées entre octobre 2022 et févier 2023, une des préoccupations des citoyens était la gestion des déchets nucléaires dans son centre d’enfouissement des déchets radioactifs Cigéo. Et pour cause, le représentant de l’Agence pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a annoncé en janvier que, si ces six nouveaux réacteurs étaient construits, « l’emprise [du centre Cigéo] serait en gros augmentée entre 20 et 40%, suivant la politique de recyclage ».
Les conclusions de la Commission particulière du débat public (CPDP) ont également mis en lumière la question sensible qu’est l’enjeu de sobriété. En effet, plusieurs participant·e·s craignent que relancer le nucléaire s’accompagne de la promotion de nos modes de vie actuels, basés sur la croissance et la consommation, au lieu de mener une réelle réflexion sur notre modèle économique énergivore. La Commission note également une certaine hypocrisie de ce débat public, car le Sénat a voté le projet de loi sur l’accélération du nucléaire en janvier 2023, et l’Assemblée Nationale l’a adopté en mars, soit avant la fin du débat public, projet qui supprime pourtant l’objectif de réduire de 50% le nucléaire dans le mix électrique français (actuellement le nucléaire représente 70% du mix électrique français).
Qu’en est-il outre-Rhin ? Alors que l’Allemagne est félicitée par Greenpeace et d’autres ONG environnementales d’avoir fermé ses trois dernières centrales nucléaires le 15 avril dernier, certains questionnent sa stratégie de se débarrasser d’une source d’énergie qui émet moins de CO2 que les énergies fossiles. Cependant, il est important de noter que le nucléaire ne représentait plus que 6% dans le mix énergétique allemand, rien à voir avec les 40% du mix énergétique français. Ce qui compte donc pour l’Allemagne est de savoir par quoi elle va remplacer ces 6% de capacité nucléaire.
Même si le ministre de l’Economie et du Climat Robert Habeck assure que le pays pourra compter sur 80% d’énergies renouvelables d’ici à 2030, la réalité est pour l’instant très différente. Avec la guerre en Ukraine et la dépendance de l’Allemagne au gaz russe, le pays a décidé de rouvrir deux centrales à charbon, une source d’énergie très émettrice en gaz à effet de serre et en particules fines. Même si la sortie du nucléaire est planifiée depuis longtemps en Allemagne et n’est pas à débattre, peut-être que le prolongement de quelques années des trois centrales nucléaires, tel qu’imaginé par Angela Merkel avant de se raviser, qui alimentaient 3 millions de foyers en électricité, aurait été une bonne idée.