Interview : l’éolien citoyen pour une maîtrise locale et participative de l’énergie
Laurianne Fleury, Animatrice de réseau énergies renouvelables citoyennes pour l’Association Eoliennes en Pays de Vilaine, nous parle de la création du premier parc éolien citoyen de France
L’éolien citoyen, qu’est-ce que c’est ?
Bien connue en Allemagne et au Danemark, la démarche consiste à fédérer riverains et collectivités locales afin de financer la création puis la gestion d’un parc d’éoliennes. Le but final étant que chacun puisse bénéficier des dividendes produits par les éoliennes.
D’où est parti le projet ? Sur base de quels constats et avec quels objectifs ?
Trois voisins réfléchissaient à des solutions pour installer une éolienne chez eux. Au vu des contraintes et difficultés, ils se sont dit qu’ils pourraient monter un projet collectif, pour que tout le monde puisse en bénéficier !
Ainsi, en 2003 a été créée l’association Eoliennes en Pays de Vilaine qui a pour but de promouvoir le développement des énergies renouvelables, plus particulièrement de l’énergie éolienne, et en parallèle de mener des actions pédagogiques pour réaliser des économies d’énergie.
Nous partons du postulat que le vent est une ressource naturelle inépuisable et décentralisée, c’est pourquoi son exploitation doit se faire aux bénéfices des territoires et non pas d’un acteur extérieur.
A Béganne (56), 4 éoliennes de 2 MW seront installées d’ici l’été 2012. Plus de 400 particuliers se sont déjà réunis en clubs CIGALES (Clubs d’investisseurs pour une Gestion Alternative Locale de l’Epargne Solidaire) pour investir dans le parc. Les collectivités souhaitent aussi investir, de même que des acteurs locaux de l’Economie Sociale et Solidaire.
Quels sont les avantages de l’énergie citoyenne ?
L’énergie citoyenne permet une meilleure acceptation des projets et surtout une réappropriation des questions énergétiques par les citoyens. C’est un vrai projet de territoire, créant des dynamiques locales importantes, via différentes manifestations locales durant lesquelles les investisseurs particuliers peuvent se retrouver. Un comité de suivi local est également mis en place afin de relayer l’information et de construire collectivement le projet. Des réunions publiques ont lieu régulièrement. Nous réfléchissons à présent à un projet pédagogique avec une éolienne des enfants, à l’image de ce qui s’est fait en Belgique avec Vent d’Houyet.
Une charte nationale, adoptée par Energie Partagée en 2010, définit les grands principes d’un projet éolien citoyen : un ancrage local, une finalité non spéculative, un fonctionnement démocratique et une transparence de la gouvernance, un contrôle citoyen de l’investissement, une autonomie et indépendance des projets, et enfin, une dimension pédagogique affirmée.
Quels sont les grands obstacles à la réalisation d’un projet ?
C’est une démarche de longue haleine, c’est le premier projet en France. Mais déjà d’autres dynamiques émergent un peu partout.
A Béganne (56), nous avons eu la chance d’avoir des élus qui nous ont soutenus dans notre démarche dès le début. Les riverains sont très impliqués. Grâce à une concertation territoriale dès le début du projet, aucune opposition ne s’est fait ressentir. C’est là une des clés du succès de ce projet.
S’il fallait donner trois conseils à un collectif de citoyen qui souhaiterait se lancer dans l’aventure, quels seraient-ils ?
Il faut être transparent dans sa démarche dès le début du projet, et associer tous les acteurs tout au long du projet, durant les différentes phases. Ainsi, les doutes et craintes peuvent être levés très en amont du projet.
Persévérance serait un second conseil !
Enfin, face aux défis énergétiques pour les années à venir, un tel projet ne peut qu’aboutir !