Vers une suppression des vols intérieurs ?

Mardi, 4 Juin 2019

Des députés français ont déposé un amendement à la Loi d’orientation des mobilités (LOM) visant à interdire certains vols intérieurs, jugés trop polluants, pour les destinations desservies par une liaison ferroviaire. L'occasion de réfléchir sur nos pratiques de mobilité.

La question des transports est un enjeu d’égalité, comme l’a rappelé le mouvement des Gilets Jaunes : tout le monde a besoin de se déplacer, pour aller au travail, accéder aux services publics, à l’hôpital, à l'école, etc. C’est aussi un enjeu écologique et sanitaire majeur alors que la pollution de l’air, causée notamment par le transport routier, entraine 67 000 décès prématurés par an.

En France, l'Assemblée nationale s'attaque, le lundi 3 juin, au projet de loi d'orientation des mobilités. Certains pointent du doigt un projet de loi tourné vers des transports polluants et inégalitaires et qui donne la priorité à la route et à l’autoroute plutôt qu’au train, avec des grands projets, jugés désastreux au niveau environnemental, comme la ligne Lyon-Turin et les contournements routiers.

Plusieurs députés proposent dans un amendement d'interdire des vols courts pour favoriser le train, bien moins polluant. Cela concerne 72 liaisons aériennes, qui peuvent être remplacés par des trajets en train de moins de cinq heures (avec maximum 2h30 de temps de trajet en plus qu'en avion). Des vols comme Paris-Bordeaux, Lyon-Rennes ou encore Marseille-Toulouse pourraient ainsi être supprimés.

Le bilan carbone de ces vols est pointé du doigt: pour un Paris-Marseille, un trajet en avion produit 92,5 kg de CO2 par passager, contre 2 kg en train.

Au niveau européen, le transport aérien n’est responsable que d’environ 3 % des émissions totales de gaz à effet de serre. Mais sa contribution devrait exploser dans les prochaines années. Les prévisions de trafic tablent sur un doublement d’ici à 2037, pour atteindre 8,2 milliards de passagers dans le monde. En France, le trafic a augmenté de 5 % en 2017. Surtout, il est le mode de transport le plus polluant, si on le compare par personne et kilomètre parcouru : deux fois plus que la voiture, et jusqu’à 40 fois plus que le train, selon les calculs de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

Cette proposition fait écho au « Flygskam », la honte de prendre l’avion, qui touche de plus en plus de Suédois et les incite à l’abandonner au profit du train, ainsi qu'aux débats sur la taxation du kérosène en Europe.

Cependant, cette proposition implique le développement d'une offre ferroviaire plus attractive et plus accessible. La suppression progressive des trains de nuit par la SNCF, de même que celle de liaisons secondaires et la fermeture de nombreuses gares, semble pourtant aller dans un sens totalement opposé, et faire la part belle au bus longue distance et à l'avion au détriment du train. Pour financer des offres alternatives attractives, notamment en train, le Réseau Action Climat propose par exemple l’instauration d’une « contribution climat » sur les billets d’avions. Elle varierait de 20 à 40 euros pour un vol national et de 50 à 100 euros pour un vol international, en fonction de la classe.

Cette mesure pourrait cependant avoir des conséquences économiques importantes pour le secteur de l'aviation, ainsi que pour les aéroports qui survivent principalement grâce à ces vols. Le gouvernement français s'est dit opposé à cette proposition.