Le modèle touristique de Barcelone : un équilibre à repenser entre économie et qualité de vie

Mardi, 13 Août 2024

Ce 8 août 2024, le Green European Journal publiait un article sur la problématique du tourisme de masse à Barcelone, soulignant ainsi les enjeux importants du modèle touristique mondial à tous niveaux, structurel, économique, écologique et social ! 

Barcelone, une ville emblématique du tourisme mondial, est aujourd'hui le théâtre d'un mouvement citoyen de plus en plus vocal contre les impacts négatifs du tourisme de masse. Avec plus de 170 000 touristes par jour, cette ville catalane, célèbre pour ses trésors architecturaux tels que la Sagrada Familia et les Ramblas, attire chaque année près de 31 millions de visiteurs, soit vingt fois sa population locale. Ce tourisme de masse, qui a repris de plus belle après la pandémie de Covid-19, est maintenant perçu par les résidents comme une menace pour leur qualité de vie.

Les habitants de Barcelone, lassés de voir leurs quartiers envahis, leurs loyers exploser et leurs commerces traditionnels disparaître, ont décidé de descendre dans la rue pour demander des changements drastiques. Ces manifestations, qui ont fait la une des journaux internationaux, sont le reflet d’un mécontentement profond. Les Barcelonais ne s’opposent pas au tourisme en soi, mais à un modèle qu'ils jugent insoutenable et inéquitable.

L'un des leaders de ce mouvement, Daniel Pardo Rivacoba, résume bien le sentiment général : « Lorsque la ville est transformée en parc d'attractions pour touristes, les habitants finissent par se sentir étrangers chez eux ». La situation est telle que certains résidents, submergés par le bruit nocturne et les nuisances diverses, en viennent à quitter la ville, incapables de suivre l'augmentation des coûts de la vie. Les protestataires réclament non seulement une limitation des terminaux de croisière et de nouvelles constructions d’hôtels, mais aussi une réappropriation des infrastructures locales pour les résidents.

En réponse, le maire de Barcelone, Jaume Collboni, a annoncé plusieurs mesures, dont l'annulation des licences de location à court terme d'ici 2028 et l'interdiction des navires de croisière d'accoster au centre-ville. Mais ces annonces sont reçues avec scepticisme par les activistes, qui y voient de simples promesses politiques sans changement structurel réel.

Ce débat sur le tourisme de masse dépasse largement Barcelone. D'autres villes européennes, comme Venise et Amsterdam, sont également confrontées à des défis similaires. Le tourisme, bien qu'une source indéniable de revenus, entraîne des coûts environnementaux et sociaux croissants. Par exemple, l'industrie du voyage est responsable de 8,1 % des émissions mondiales de CO2, et la consommation d'eau dans les hôtels de luxe atteint des niveaux alarmants. Les experts et les activistes appellent donc à une redéfinition de ce modèle, avec des propositions allant de l'interdiction des transports élitistes comme les jets privés à l’extension des réseaux ferroviaires pour encourager un tourisme plus durable.

À Barcelone, le mouvement Quartiers pour la décroissance touristique pousse pour une vision du tourisme plus respectueuse des habitants et de l’environnement, en prônant une décroissance réfléchie et inclusive. Ils souhaitent que ces discussions s’étendent au niveau européen, afin de repenser fondamentalement la manière dont le tourisme est réglementé et pratiqué.

La question centrale reste donc : comment concilier l’accessibilité démocratique du voyage avec la protection des citadins et de leur cadre de vie ? Barcelone pourrait bien devenir un modèle pour d'autres villes confrontées aux mêmes défis.