Alimentation durable et mixité sociale : le cas de BEES coop

Mercredi, 27 Mars 2019

Les initiatives de transition peinent souvent à inclure les publics socio-économiquement défavorisés. Une recherche-action participative menée dans le supermarché coopératif BEES coop, à Schaerbeek, a permis d’identifier une série de freins et de pistes d’action pour assurer plus de mixité sociale. Les résultats sont présentés sous la forme d'un web documentaire intitulé "Tous à la même enseigne ?".

BEES coop est un supermarché coopératif à finalité sociale qui a ouvert ses portes en 2016 à Schaerbeek. Ce quartier de Bruxelles est caractérisé par une forte diversité socio-économique, un faible taux d’emploi, des ménages jeunes et de nombreuses familles avec enfants.

Pourtant, cette diversité ne se retrouve pas dans les membres du supermarché coopératif. Deux ans après l’ouverture du supermarché, la communauté de coopérateurs n’est pas représentative de celle du quartier. Le projet peine à élargir sa base et à toucher une grande diversité de publics, ce qui risque de renforcer involontairement la fracture alimentaire au sein de la population du quartier. Les inégalités sociales qui caractérisent déjà la consommation alimentaire aujourd’hui, risquent de se reproduire au sein des modèles alternatifs qui participent à la nécessaire transition du système alimentaire.

C’est face à ce constat qu’a été lancée la recherche-action participative « Falcoop », associant une équipe de chercheurs (CEESE-Université libre de Bruxelles), des coopérateurs de BEES coop, des acteurs locaux et les habitant.e.s d’un quartier bruxellois.

L’objectif défini de Falcoop est de « favoriser l’accès à une alimentation durable et de qualité pour un public représentatif de la diversité urbaine par l’implantation locale d’un modèle innovant de supermarché coopératif ».

Le projet s’est déroulé de 2015 à 2018. Pendant trois ans, les chercheurs.euses les bénévoles, les acteurs socio-culturels et les habitant.e.s du quartier ont travaillé ensemble pour faire émerger des questions et des freins, conçu et réalisé des outils, imaginé et expérimenté des pistes d'actions pour renforcer l’accessibilité de tou.te.s à une alimentation durable et de qualité.

La recherche participative a permis de mieux connaître les habitudes alimentaires et les attentes des habitant.e.s du quartier, et de comprendre les raisons pour lesquelles il leur est difficile de participer à tel projet coopératif. La recherche a identifié une multiplicité de freins et de pistes d’action touchant à quatre volets du projet coopératif :

  • La communication

Il faut rendre la communication plus inclusive, accessible au plus grand nombre et adaptée aux différents publics du quartier (vocabulaire, langues...)

  • L’offre du magasin

Les prix, la méconnaissance de l'alimentation durable et la gamme de produits constituent des freins à une accessibilité plus large, qu'il faut surmonter par une meilleure étude des habitudes alimentaires des habitant.e.s du quartier et une meilleure communication sur l'alimentation durable

  • Le travail bénévole

Le travail bénévole obligatoire ne va pas de soi pour tout le monde. Tou·te·s les habitant·e·s bruxellois·e·s ne sont pas égaux·ales face aux exigences de la participation. Les situations de vie et les vécus varient, créant des inégalités. Pour atténuer ces inégalités, il faudrait mettre en place des systèmes plus souples (meilleure intégration, période d'essai, échanges de créneaux, entrée plus progressive dans la coopérative etc.)

  • Le modèle coopératif et participatif

La gouvernance participative impacte, elle aussi, l’accessibilité et l’inclusion du supermarché coopératif. Des difficultés d’ordre socio-culturel (temps disponible, sentiment d'illégitimité, peur de s'exprimer etc.) émergent face à la participation aux espaces décisionnels de la coop. Le web documentaire suggère la mise en place d'un accompagnement plus personalisé par exemple.

Plusieurs actions ont été testées et d'autres le seront prochainement. Cependant, le web documentaire insiste sur l'incapacité d'un projet, aussi ambitieux soit-il, à résoudre à lui seul les inégalités face à l'alimentation.